Le faible engagement au travail est l’un des problèmes les plus pressants auxquels sont confrontées les entreprises et les organisations.
Selon la dernière enquête du cabinet de conseil américain Gallup, en ce qui concerne la France, le scénario est même inquiétant : seulement 8 % des personnes sont employées sur leur lieu de travail.
Que peut-on faire pour augmenter l’engagement des gens ? Dans cet article, nous essayons de donner quelques suggestions concrètes, à partir de la définition de l’engagement et de l’aperçu le plus récent de ce que sont les niveaux d’implication des personnes au travail.
Qu’est-ce que l’engagement : une définition
L’engagement, c’est plus qu’impliquer les gens dans ce qu’ils font et dans l’entreprise pour laquelle ils travaillent.
Pour Gallup, l’engagement est le niveau d’implication et d’enthousiasme des employés envers leur travail et leur lieu de travail.
Dans un domaine plus académique, le psychologue du travail Wilmar Schaufeli, auteur avec Laura Borgogni et Pieternel Dijkstra du livre Engagement : passion au travail, définit l’engagement des employés comme un état d’esprit positif et épanouissant lié au travail composé de trois composantes fondamentales :
- la vigueur, c’est-à-dire la volonté des gens d’investir de l’énergie et des efforts dans leur travail, même face aux difficultés ;
- le dévouement, c’est-à-dire l’enthousiasme, l’inspiration, la conscience et la fierté que les gens ressentent en travaillant, qui proviennent de la perception du sens de ce qu’ils font ;
- l’absorption, c’est-à-dire l’état dans lequel les gens sont tellement concentrés sur ce qu’ils font qu’ils remarquent à peine le temps qui passe.
Un aperçu : les niveaux d’engagement de Gallup
Comme nous l’avons déjà mentionné, le cabinet de conseil américain Gallup a fourni un aperçu actualisé des niveaux d’engagement dans différents pays grâce à son étude State of the Global Workplace.
L’édition 2024 du rapport, qui a examiné un échantillon d’environ 128 000 personnes de 160 pays différents, révèle que, dans le monde, seulement 23 % des personnes déclarent être engagées au travail. La majorité des gens (63 %) ne sont pas engagés, tandis que 15 % disent qu’ils sont activement désengagés ; C’est cette partie de la population de l’entreprise qui, en plus de ne pas se sentir impliquée, se bat même contre l’entreprise.
Si la situation mondiale n’est pas rose, en Europe et en France, elle est encore pire. Le Vieux Continent est en effet la zone géographique qui enregistre le taux moyen d’engagement le plus bas au monde (13 %), et notre pays se classe avant-dernier avec seulement, comme anticipé, 8 % des personnes interrogées qui se disent engagées.
Coûts et avantages de l’engagement
Les faibles niveaux d’engagement affectent non seulement le bien-être des travailleurs – avec une augmentation du stress, de la tristesse et de la colère sur le lieu de travail – mais ont également un coût pour les entreprises : Gallup estime qu’ils entraînent une perte de 8,9 billions de dollars pour l’économie mondiale.
Au contraire, les organisations qui parviennent à augmenter le niveau d’engagement en bénéficient en termes de moins d’absentéisme (moins de 78 % par rapport à de faibles niveaux d’engagement), d’augmentation de la productivité (entre 13 et 17 % de plus), de taux de rotation plus faibles et d’augmentation de 68 % du bien-être des personnes.
Quelques conseils pratiques pour améliorer l’engagement des personnes dans l’entreprise
Compte tenu des faibles niveaux d’engagement dans le monde, bien qu’avec des différences territoriales dues à celles-ci, la question est de savoir comment les augmenter. Ci-dessous, nous vous proposons quelques suggestions concrètes, en faisant quelques prémisses.
La première est que la connaissance de son entreprise et de ses employés est une condition préalable nécessaire avant de prendre une décision.
Il est clair que toutes les suggestions proposées ne peuvent pas être adoptées de la même manière par toutes les entreprises, tout comme il est clair que leur efficacité peut dépendre de nombreuses variables.
Malgré toutes les suggestions proposées, ce qui est écrit dans le livre susmentionné Engagement : la passion au travail : sans la collaboration des personnes, toute initiative visant à améliorer l’engagement est potentiellement vouée à l’échec.
Il est donc crucial qu’il y ait une communication claire entre la direction et les employés et un partage de base des raisons de chaque décision et initiative.
Enfin, nous soulignons que travailler sur l’engagement des collaborateurs demande du temps et de la persévérance. Atteindre des taux d’engagement élevés est un objectif qui, une fois atteint, doit être maintenu dans le temps, et qui risque de ne pas durer longtemps si l’engagement de l’organisation – et surtout de ses managers – pour y parvenir fait défaut.
Le rôle des managers est fondamental pour accroître l’engagement
L’un des leviers les plus importants pour favoriser l’engagement concerne le rôle des managers. L’enquête Gallup susmentionnée révèle que les managers sont responsables de 70 % des changements dans le niveau d’engagement des employés.
Si les managers agissent comme des modèles positifs, se montrant engagés et engagés au travail, même ceux qui n’occupent pas de rôles managériaux seront plus engagés.
Une autre enquête menée en décembre 2020 par le CERC (Centre pour les relations et la communication avec les employés de l’Université IULM) auprès de certaines grandes entreprises françaises, arrive au même résultat, mais en partant d’une autre question : quels sont les facteurs qui inhibent l’engagement dans l’entreprise ?
Il est apparu que l’incohérence entre ce que les managers disent et ce qu’ils font est le principal facteur qui fait s’effondrer l’engagement, suivi de leur attitude arrogante, arrogante, indifférente ou cynique.
Être à l’écoute de l’humain : le rôle de la communication interne
L’écoute des gens est un élément qui doit unir tout plan d’engagement. Cela peut sembler une suggestion anodine, mais souvent le rythme de travail de plus en plus effréné ne permet pas aux entreprises d’être vraiment à l’écoute de leurs employés.
Etablir un dialogue est au contraire essentiel pour connaître les besoins des personnes qui font partie de l’entreprise, ce qui les motive à rester, ce qui les pousse à s’engager de plus en plus dans ce qu’elles font.
Et même certains sondages s’accordent sur l’importance de cette pratique. Un article publié dans Il Sole 24 Ore, citant la recherche susmentionnée de la CERC, révèle que les pratiques managériales les plus importantes pour favoriser l’engagement sont le dialogue entre les gestionnaires et les employés pour fournir de l’information ou expliquer les objectifs, les plans, les stratégies et les conversations informelles pour solliciter de la rétroaction.
La communication interne, poursuit l’article, peut également aider à donner la parole aux personnes dans les entreprises et les organisations et à les faire se sentir entendues. Tous les types de communication interne sont pertinents : avec les responsables hiérarchiques, la communication au sein des équipes, la communication au sein des équipes projet et la communication interne de l’entreprise.
Parmi les outils de communication interne considérés comme les plus pertinents pour l’engagement des employés, on retrouve ceux qui génèrent une interaction directe avec la direction, tels que les réunions informelles ou les conventions. S’ensuivent des outils de communication en cascade, des outils tels que des newsletters, des blogs et des e-mails et enfin des intranets et des TV d’entreprise.
Adopter une approche organisationnelle ouverte
S’appuyant à nouveau sur l’enquête menée par CERC auprès des grandes entreprises françaises, l’article susmentionné de Il Sole 24 Ore se concentre également sur les modèles organisationnels qui favorisent l’engagement ou, au contraire, l’entravent, en analysant trois éléments : la relation avec les employés, l’approche de la justice organisationnelle et la manière dont les ressources humaines sont gérées.
Seulement 13 % des entreprises de l’échantillon adoptent une approche ouverte de la relation avec les employés, une approche équitable de la justice organisationnelle et une approche appréciative de la gestion des ressources humaines, configurant un contexte organisationnel pleinement engageant.
43 % des entreprises ont des relations hiérarchiques avec les collaborateurs, une justice organisationnelle et une gestion administrative des ressources humaines injustes, créant des contextes organisationnels qui multiplient le désengagement.
Les 44 % d’entreprises restantes ont des situations mixtes où les facteurs d’engagement et de désengagement sont mélangés.
Ces données reflètent celles mises en évidence par Gallup et montrent comment, en particulier en France, le chemin vers la construction de contextes de travail adaptés pour soutenir l’engagement total des personnes est encore long.
Fournir un retour d’information personnalisé
Les commentaires sont déjà apparus parmi les suggestions pour améliorer l’engagement. Le livre susmentionné Engagement : passion at work, met l’accent sur l’importance de fournir une rétroaction personnalisée et efficace.
Il ne s’agit pas seulement de retours positifs : même si les compliments sont toujours sympas, comme nous le verrons plus loin, la dimension intrinsèque de la motivation est selon certains chercheurs plus importante que la dimension extrinsèque, et emprunte différents chemins pour se nourrir.
Il ne s’agit donc pas seulement de compliments, mais aussi de commentaires négatifs, à condition qu’ils soient donnés de manière constructive. De cette façon, les commentaires négatifs aideront les gens à devenir plus conscients de leurs erreurs et de ce qu’ils peuvent faire pour s’améliorer.
Remodelage du travail
Une autre suggestion fournie par Schaufeli, Borgogni et Dijkstra aux entreprises pour augmenter l’engagement de leurs collaborateurs et employés est de varier leur activité de travail.
Dans ce cas également, une prémisse est nécessaire : c’est une astuce qui fonctionne pour les personnes qui ont l’impression d’avoir perdu des stimuli dans leur entreprise et qui recherchent de nouveaux défis.
Le travail d’une personne dans l’entreprise peut être modifié de différentes manières : par des promotions ou par l’attribution de nouveaux rôles qui impliquent de nouvelles responsabilités ; par le remodelage des tâches ou l’attribution de nouvelles tâches qui impliquent la nécessité d’apprendre de nouvelles connaissances, compétences, outils.
« En prenant la responsabilité de nouvelles activités ou de nouveaux rôles », expliquent les trois psychologues dans leur livre, « les employés ont la possibilité d’orienter leur carrière dans la direction souhaitée, conformément aux valeurs qu’ils jugent importantes, augmentant ainsi le niveau d’engagement. »
Renforcer le lien entre les membres d’une équipe de travail
Si le climat et l’ambiance au sein d’une équipe de travail ne sont pas bons, l’engagement ne pourra pas augmenter. Pour cette raison, il convient de renforcer la qualité des liens sociaux et des relations entre les personnes, en promouvant certaines actions spécifiques, dont beaucoup s’inscrivent dans les cas précédents :
- encourager et renforcer une culture fondée sur l’équité et l’éthique, en établissant des règles de conduite claires ;
- Faire des leaders et des managers un exemple positif et incarner cette culture, afin que les gens les voient comme un modèle à inspirer ;
- Créer des rituels, des occasions de socialisation, de discussion et d’échange qui peuvent fonctionner comme des incubateurs de liens et de relations. Pour faciliter la création de relations de valeur, il peut être utile de concevoir et d’animer des communautés internes, qui rassemblent les personnes sur la base d’un noyau fort de sens partagé : une pratique ou une profession, un ou plusieurs intérêts, ou des enjeux transversaux tels que la durabilité, la DEI, l’intelligence artificielle.
Travail sur la motivation intrinsèque
D’après la définition de l’engagement partagée ci-dessus, nous pouvons dire que la motivation, c’est-à-dire la force qui pousse un individu à agir d’une certaine manière pour atteindre des objectifs spécifiques, fait partie de l’engagement.
La motivation alimente spécifiquement certaines des dimensions de l’engagement, telles que la vigueur et le dévouement, et en ce sens, travailler sur la motivation peut également aider à améliorer l’engagement.
Selon l’écrivain américain Daniel H. Pink, ce qui motive vraiment les gens, les encourageant à donner le meilleur d’eux-mêmes même au travail et à être satisfaits, c’est la motivation intrinsèque. Cette idée est à la base de son livre à succès, Drive : The Surprising Truth About What Motivates Us, dans lequel l’auteur souligne comment les incitations traditionnelles telles que l’argent et les récompenses externes ne sont pas toujours efficaces pour motiver les gens.
Selon Pink, pour augmenter la motivation intrinsèque des gens, nous devrions plutôt travailler sur trois éléments clés :
- L’autonomie, c’est-à-dire le désir de diriger sa propre vie.
- Maîtrise : La volonté de s’améliorer continuellement dans quelque chose qui compte.
- Objectif : La nécessité de faire ce que nous faisons pour quelque chose de plus grand que nous-mêmes.
Pour améliorer l’autonomie des personnes, il peut leur être offert la possibilité de choisir comment effectuer leur travail, grâce à des mécanismes de flexibilité dans les horaires, la possibilité de choisir les projets sur lesquels travailler ou la manière d’atteindre les objectifs. L’autonomie augmente le sentiment de contrôle et de responsabilité personnelle.
Pour travailler sur l’élément clé de la maîtrise, l’entreprise pourrait créer un environnement qui favorise l’apprentissage continu et la montée en compétences. Cela peut se faire par le biais de parcours de formation ou en fournissant des commentaires constructifs, ainsi qu’en offrant aux gens des opportunités de défis croissants. Le sentiment de progrès et d’amélioration constants est un puissant facteur de motivation.
Enfin, pour travailler sur l’élément clé de l’objectif, il est nécessaire de lier l’œuvre à un objectif plus large et plus significatif. Les gens sont plus motivés lorsqu’ils sentent que leur travail contribue à quelque chose d’important. Communiquer clairement la mission et les valeurs de l’organisation, agir conformément à ces valeurs et clarifier comment le travail individuel contribue à la direction prise par l’entreprise peut accroître le sentiment d’utilité.
Exploiter le pouvoir transformateur de l’IA
Nous concluons ce bref aperçu de conseils pratiques pour améliorer l’engagement en mettant l’accent sur le rôle de l’intelligence artificielle. L’IA, et l’IA générative en particulier, domine les conversations sur l’évolution du monde du travail depuis des années. Ce sont des technologies accompagnées de grandes promesses et d’attentes, mais dont la valeur générée reste encore à explorer.
Selon la société de design Logotel, les fonctions RH et People & Culture des entreprises peuvent intercepter le potentiel de transformation de l’IA générative et le traduire en valeur pour les gens, en les aidant à apprendre, désapprendre, expérimenter et enflammer leur esprit.
En les encadrant avec de nouvelles perspectives collaboratives, en créant des contextes dans lesquels expérimenter et en les nourrissant chaque jour, l’IA générative est une occasion extraordinaire de repenser le leadership, la culture organisationnelle et d’améliorer l’expérience et l’engagement des employés.
Réflexions finales : Vers une nouvelle culture de l’engagement
L’engagement est l’un des défis auxquels les entreprises et les organisations sont confrontées dans un monde du travail de plus en plus fragmenté. En plus d’affecter le bien-être des personnes au travail et en dehors du travail, un niveau élevé d’engagement a également un effet positif sur les performances de l’entreprise.
Le scénario français actuel, avec seulement 8 % des travailleurs embauchés, représente non seulement un enjeu critique, mais aussi une opportunité : mettre l’engagement au centre de la stratégie d’entreprise peut générer un cercle vertueux capable d’apporter des avantages à la fois aux personnes et aux résultats de l’entreprise.